La transmission par le lien intergénérationnel

Le 09/07/2021
Il s’agit de mettre en avant la place de nos ainés au sein de la société dans une cohésion entre les générations dont la clé de voûte est la transmission culturelle dans une pratique partagée.
 

Ouvrir les restaurants scolaires à nos aînés

L'idée est simple, il s’agit d’ouvrir les restaurants scolaires sur le temps de la pause méridienne à nos aînés. Le temps d’un repas, chaque aîné prend place autour de la table des enfants et déjeune en leur compagnie. Cela permet aux enfants de profiter d’un adulte le temps du repas. En effet, il est clair qu’un animateur pour 30 enfants en moyenne n’aura pas le temps suffisant pour les inciter à goûter aux plats proposés. En revanche, le fait d’avoir un aîné attablé à leurs côtés, goûtant, échangeant avec eux, incitera d’autant plus facilement qu’ils seront encouragés, stimulés dans l’éveil à de nouvelles saveurs et textures.

Offrir le repas permettrait de fidéliser nos aînés dans cette découverte de l’autre. Il faudrait privilégier les mercredis, temps plus calme pour les centres de loisirs où il est plus simple d’organiser des activités dans la continuité du repas autour de thématiques telles que la réalisation de gâteaux, de fresques ou bien l’entretien d’un potager commun… Dans un premier temps, une prise de contact avec les enfants peut se faire autour d’un goûter. Dans un second temps, les aînés seront accueillis par le personnel communal pour les guider dans ce nouvel espace. Le but est aussi de rompre l’isolement et leur permettre de prendre un repas équilibré. Plus que le portage des repas à domicile, la prise d’un repas en commun est essentielle car elle permet de socialiser en même temps que de nourrir.

 

Recréer du lien entre les générations en passant par l’enceinte de l’école

Mais ce concept va bien au-delà de ce constat essentiel. C’est la force de la transmission d’expérience des plus âgés vers les plus jeunes, un passage de flambeau dans le savoir-faire et le savoir-être. De nos jours, bon nombre de grands-parents sont encore en activité professionnelle ou bien retirés en province pour profiter de leur retraite. Nos papis et mamies d’accueil deviennent alors des acteurs de terrain, des grands-parents de substitution. Cet élan de fraternité et de complémentarité devra être entretenu pour tisser ce lien dans un maillage convivial. Mais surtout, le but second est de créer un lien social avec les enfants et leurs parents au-delà du cadre périscolaire avec l’organisation de sorties, dîners, etc. en dehors de la sphère cantine. C’est tout l’enjeu de ce projet, recréer du lien entre les générations en passant par l’enceinte de l’école.

De premières expériences concluantes

Plusieurs expériences ont largement démontré que l’intergénérationnel est un vecteur de solidarité sociale.

Un moment de transmission intergénérationnelle

À ce jour, quelques collectivités territoriales ont fait le choix d’ouvrir les restaurants scolaires à nos aînés, convaincus du bien-fondé de ce relationnel fructueux quand deux tranches d’âge éloignées se réunissent. Pour les uns, la routine du quotidien est cassée. C’est une stimulation cognitive dans leur parcours hebdomadaire pour se préparer à la prochaine rencontre avec les enfants qui leur apporte joie, bonheur, sourire et gaité par l’échange au cours du repas, mais également lors d’activités périscolaires en petits groupes. En retour, nos aînés racontent leurs savoir-faire, leurs connaissances, leurs souvenirs d’un temps que nos jeunes ignorent. C’est la transmission culturelle intergénérationnelle.

Un projet artistique en binôme

J’ai organisé une rencontre entre les plus jeunes d’un centre de loisirs et une résidence de personnes âgées. Le projet ? réaliser une statue en mosaïque représentant un adulte tenant la main d’un jeune enfant. Ce projet solidaire a duré un an avec des visites hebdomadaires que nos seniors attendaient avec un plaisir non dissimulé. La veille, certaines mamies prenaient rendez-vous chez le coiffeur pour se présenter sous leur meilleur jour et les papis sortaient la belle chemise et la cravate. Nos enfants, quant à eux, venaient accompagnés par les animateurs avec des friandises faites maison, des cadeaux, des livres à partager.

Durant toute cette année, j’ai vu se créer un lien fort, indescriptible de beauté fraternelle et de sincérité du coeur. Le jour de l’inauguration fut un temps fort en émotion et riche en partage. Chaque binôme (enfant et senior) expliquait devant les parents conviés à cette cérémonie tout le travail réalisé : collage des mosaïques, création de l’armature en fer, choix des couleurs. Une vive émotion a traversé l’espace au moment de la découverte de cette statue, fruit du travail des aînés et des plus jeunes, symbolisant parfaitement ce lien entre générations. Aujourd’hui encore, ces jeunes devenus adolescents continuent de rendre visite à leur papi ou mamie de coeur.

Changer de regard sur l'autre

La cohésion et la réunion de deux générations créent du lien social : casser l’isolement de nos aînés, stimuler leur mémoire, déployer de l’interaction et, pour les plus jeunes, découvrir, partager, échanger. C’est une manière originale et efficace de retrouver des valeurs de fraternité et de cohésion sociale dans un contexte où la proximité humaine et la mixité sociale sont actuellement malmenées. Chacun change alors son regard sur l’autre dans le respect des valeurs de partage et de transmission.

 

Bruno Le Bricon

« Maire adjoint de Carrières-sur-Seine de 2008 à 2018 en charge de l’enfance, jeunesse, sports et restauration scolaire, j’ai été un élu de terrain avec une vision transverse sur la sphère scolaire, périscolaire et sportive. À l’initiative de l’implantation des Self qui font grandir en élémentaire, j’ai également participé activement au projet Clémantine. J’ai toujours prôné une politique de proximité à laquelle je suis attaché. »

Bruno Le Bricon