Intervention de Julien Denormandie - Défis & Controverses avril 2021

Le 14/04/2021

Julien Denormandie, ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, est intervenu à l'occasion de notre Défis & Controverses du 7 avril 2021, organisé en partenariat avec la Commission Bio d'Interbev, sur la loi EGAlim et les viandes Bio en restauration scolaire. Découvrez ici l'intégralité de son intervention

« Bonjour à toutes et tous, le contexte sanitaire nous oblige malheureusement à échanger par écrans interposés et à inventer de nouvelles manières de vous réunir comme vous le faites avec cet événement inédit. Et je dois le dire, je suis particulièrement heureux de m’adresser à vous à cette occasion. La loi EGAlim, vous le savez, a fixé un objectif très précis à la restauration collective. Il s’agit d’intégrer à ses menus au moins 50 % de produits durables ou de qualité, dont au moins 20 % de produits biologiques, à compter du 1er janvier 2022. Cet objectif est ambitieux mais il répond à la fois aux attentes de nos agriculteurs et de nos concitoyens. D’une part, c’est un enjeu de souveraineté pour notre agriculture car il s’agit au final d’offrir des débouchés à nos agriculteurs. D’autre part, les Français accordent de plus en plus d’importance à leur alimentation, véritable déterminant de leur santé. Cette mesure concourt donc à un véritable objectif de santé publique : manger sainement à l’école, au travail, à l’hôpital. C’est un objectif absolument essentiel et c’est d’ailleurs pourquoi le gouvernement a proposé de l’étendre à la restauration collective privée dans le cadre du projet de loi Climat en cours d’examen à l’Assemblée. A la fois pour créer plus de débouchés pour nos agriculteurs et en même temps pour promouvoir des produits de qualité au sein de cette restauration.

Un chantier important a été mené pour savoir où nous en sommes aujourd’hui par rapport à cet objectif fixé dans la loi EGAlim pour le 1er janvier 2022. L’étude que nous avons réalisée a porté sur près de 42 millions de repas servis en 2019 par les grands groupes de la restauration collective. Cela révèle l’ampleur du travail à réaliser, ne serait-ce que pour savoir d’où on part. Et au début de l’année 2021, nous avons eu ces premiers résultats qui montrent que dans la restauration collective publique, à peu près 15 % de produits de qualité sont servis, dont 7 % issus de l’agriculture biologique. Cela montre la marche qu’il reste à franchir pour atteindre cet objectif de la loi EGAlim – 50 % de produits de qualité, dont 20 % issus de l’agriculture biologique. Alors, dans le contexte de crise sanitaire, cet objectif n’est évidemment que plus sollicité par l’ensemble de nos concitoyens qui voient bien à quel point l’alimentation est un vecteur sanitaire. Mais il est encore plus complexe à atteindre par les restaurateurs eux-mêmes – de ces restaurations collectives – du fait d’empêchements ou de difficultés logistiques liées à la crise de la covid.

Mais cela ne doit absolument pas nous arrêter, bien au contraire. Cela doit nous renforcer notre vision et notre volonté d’avancer en ce sens. Et même pour les établissements les plus en pointe, effectivement un certain nombre d’approvisionnements a pu être complexe. Il n’en reste pas moins que si nous voulons à la fois relever ce défi de débouchés et en même temps relever cette attente de nos concitoyens, nous devons être à la hauteur de l’ambition que nous nous sommes fixées.

Le défi est massif pour l’ensemble de nos productions. Il est peut-être encore plus massif et important pour la production de viandes dans la mesure où, au moment où on se parle, la majorité des viandes consommées dans la restauration collective, sont importées. Prenons la restauration scolaire par exemple, c’est plus de 60 % de viandes données aux enfants qui proviennent de pays étrangers, surtout en volaille d’ailleurs, mais c’est également le cas pour la viande. Cela peut parfois susciter des interrogations sur la qualité de ces produits souvent soumis à des normes différentes de celles qui s’appliquent à la viande française. Et c’est pour cette raison que je suis favorable aux mesures qui permettront d’assurer une meilleure qualité de la viande servie en restauration collective. Cela passe notamment par la question de l’affichage sur l’origine des viandes et mon objectif c’est que, d’ici l’été, puisse être pris ce fameux décret sur l’affichage sur l’origine des viandes non transformées en restauration collective pour imposer, par voie réglementaire, que cet affichage soit obligatoire dans toutes les restaurations collectives. C’est pour moi un point absolument fondamental. Je le disais, le chemin est encore long.

Tous ces résultats, que j’ai évoqués, ne doivent pas nous faire oublier la trajectoire de progression qui avait démarré avant le début de l’épidémie. Il nous faut aujourd’hui la poursuivre, l’accélérer, la consolider. Nous devons donc redoubler d’efforts pour développer l’approvisionnement à proximité et l’intégration de produits de qualité aux repas de la restauration collective. Et à ce titre, deux leviers sont très importants à mes yeux et sont en notre possession, notamment à travers le plan de relance. D’abord, il existe un levier absolument primordial selon moi, c’est l’exemplarité de l’Etat. Les restaurants administratifs publics représentent à peu près 2,5 % des repas servis, quand les armées représentent 1 % de ces repas, et l’hôpital public près de 10 % des repas servis. Une opportunité, donc, de toucher beaucoup de monde et c’est pourquoi il me semble absolument nécessaire que cette action commence d’abord par l’action de l’Etat qui se doit d’être exemplaire. Et c’est d’ailleurs pour cela que j’ai réuni récemment l’ensemble des secrétaires généraux de tous les ministères concernés, pour fixer avec eux une feuille de route, m’assurant de l’atteinte de ces objectifs de la loi EGAlim. Je sais que cela peut être compliqué ici ou là mais il nous faut changer des habitudes pour aller atteindre cet objectif.

Le deuxième élément, c’est le plan de relance qui contient de nombreuses mesures relatives à l’alimentation et aux circuits courts. Je pense évidemment tout particulièrement aux cantines scolaires des petites communes, si importantes à mes yeux. Les cantines scolaires sont des lieux qui permettent de lutter contre les inégalités sociales alimentaires. Et ce sont des lieux où il faut servir des produits de qualité, des fruits et légumes de qualité, de la viande de qualité. Et donc je suis convaincu qu’il est nécessaire d’accompagner et d’aider ces structures et c’est pour ça que dans le cadre du plan de relance 50 millions d’euros sont dédiés aux cantines et notamment aux cantines des communes de petite taille afin qu’elles puissent s’équiper en matériel et ainsi mieux s’approvisionner en circuits courts. Car, oui, c’est cet approvisionnement de proximité qui permettra à l’évidence de relever les objectifs de la loi EGAlim. Cela répond aux attentes des Français, désireux de connaître l’origine des produits qu’ils consomment, et constitue une formidable opportunité pour les éleveurs et les producteurs de nos territoires. Car derrière tous ces repas servis dans la restauration collective se trouvent des agriculteurs et développer des circuits courts et progresser dans l’atteinte des objectifs de la loi EGAlim, c’est aussi leur permettre de trouver de nombreux et nouveaux débouchés commerciaux tout en valorisant des filières d’excellence qui font la renommée de l’ensemble de nos territoires et de notre pays.

Au titre du plan de relance, nous allons également investir massivement dans ce qu’on appelle les projets d’alimentation territoriaux, qui visent précisément à structurer localement ces approvisionnements en produits de proximité. A la fin des fins, si nous arrivons à produire des aliments de qualité et que nous faisons en sorte qu’ils soient servis dans les cantines de nos enfants ou dans les restaurations publiques comme privées avec les modifications législatives, c’est évidemment plus de revenus décents pour nos agriculteurs et une confiance retrouvée et renforcée dans ce qui fait l’ADN du monde agricole, c’est-à-dire la qualité.

Je souhaite, pour conclure, remercier très sincèrement à la fois Interbev Bio et Cantines responsables pour l’organisation de ce webinaire et pour leur invitation. Cette belle initiative permettra, j’en suis sûr, d’échanger de manière très concrète sur les manières d’atteindre les objectifs de la loi EGAlim. Et en ce sens, je tiens à vous assurer de mon plein soutien, du plein soutien de mon ministère, à vous dire que je suis à vos côtés au travers de l’ensemble de ces mesures que j’ai évoquées, que ce soit sur l’origine, que ce soit sur l’investissement du plan de relance – 50 millions d’euros dans les cantines, 80 millions dans les projets d’alimentation territoriaux – ou que ce soit dans le renforcement des dispositions prévues en ce moment-même dans les débats législatifs autour du projet de loi Climat. »

 

Le replay du webinaire est disponible sur notre chaîne YouTube.

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