19 Fév

En France plus d’un élève sur deux mange à la cantine. Des chercheurs de l’Inra et de MS-Nutrition se sont intéressés à la qualité nutritionnelle des repas servis dans les écoles. Ils soulignent l’intérêt nutritionnel des critères qui fixent la fréquence de service des plats et montrent que si on s’éloigne trop de ces critères, notamment pour ce qui concerne les plats dits protidiques, la qualité nutritionnelle se dégrade. Ces résultats sont publiés le 13 février 2018 dans la revue Nutrients.

En France la restauration scolaire est encadrée par une réglementation et des recommandations relatives à la qualité nutritionnelle des repas. Ces directives poursuivent un objectif nutritionnel de santé publique et visent à éduquer les enfants au goût et à la diversité alimentaire, tout en tenant compte de leurs habitudes alimentaires et des contraintes des professionnels du domaine. Ainsi, à l’école, les repas comprennent quatre ou cinq plats (entrée, plat protidique, accompagnement, produit laitier, dessert) et doivent respecter une liste de 15 critères fréquentiels - par ex. les plats protidiques ayant un rapport protéines/lipides ≤ 1 ne doivent pas être servis plus de deux fois dans une série de 20 repas successifs.

Au-delà des objectifs nutritionnels, ces repas suscitent également des attentes multiples relatives à la qualité organoleptique, au soutien à l’agriculture locale, à la lutte contre le gaspillage alimentaire ou encore à l’impact environnemental. Ils font aussi l’objet de demandes spécifiques relevant de valeurs et principes religieux, philosophiques, éthiques et autres.

De la qualité des repas pris à l’école

S’intéressant à la qualité nutritionnelle des repas servis dans des écoles primaires, des chercheurs de l’Inra et de MS-Nutrition ont analysé pas moins de 40 séries de 20 repas (on parlera de séries observées). Pour chaque plat, ils disposaient de sa fiche technique, c'est-à-dire sa recette détaillée - données fournies par des structures de restauration collective faisant appel à un prestataire ou non. La qualité nutritionnelle des séries observées a été estimée par l’adéquation nutritionnelle moyenne (ANM), un indicateur qui reflète l’adéquation entre les teneurs en 23 nutriments protecteurs (protéines, fibres, vitamines, minéraux, acides gras essentiels…) dans les repas, et les recommandations d’apports en ces nutriments pour les enfants.

Les chercheurs ont ainsi mis en évidence que les séries observées respectaient en moyenne 9,7 critères fréquentiels sur 15. Le critère le moins bien suivi était celui limitant les « plats protidiques contenant moins de 70 % du grammage recommandé pour la portion de viande, de poisson ou d'œufs » à 3 repas maximum sur 20. Très hétérogènes en termes d'ingrédients et donc de qualité nutritionnelle, ces plats étaient tout aussi bien des lasagnes, des légumes farcis ou des quiches que des plats entièrement végétariens (quenelles en sauce tomate, pizzas au fromage ou riz aux légumes).

Dans les séries observées, les repas apportaient en moyenne 36 % des recommandations d’apports journaliers en énergie. La moitié des besoins journaliers en nutriments protecteurs était assurée par ce simple repas de midi (ANM 49 %) dont la qualité nutritionnelle est donc, en moyenne, très bonne.

 

De l’intérêt des critères de fréquence sur la qualité des repas

Cinq scenarios ont également été simulés afin d’évaluer l’intérêt des critères fréquentiels pour la qualité nutritionnelle des repas. Chacun a généré pas moins de 1600 séries de 20 repas (on parlera de séries simulées).

Les chercheurs ont montré que, dans les séries simulées ‘Conformes à l’observé’, plus les critères fréquentiels sont respectés, plus la qualité nutritionnelle – évaluée comme précédemment - augmente.

L’ANM la plus élevée était obtenue pour le scénario ‘Respect total des critères’, confirmant l’intérêt nutritionnel des directives. Le scénario ‘Retrait du plat protidique’ conduisait à la plus faible ANM, encore plus faible que le scénario ‘Aucun respect des critères’. Cette mauvaise qualité nutritionnelle s’explique par le fait que les plats protidiques apportent la majeure partie des protéines et contribuent aussi de façon majoritaire aux apports en de nombreux nutriments indispensables à la santé comme les acides gras oméga 3 à longue chaîne, les vitamines B3, B6, B12 et D, le fer, le zinc, l’iode et le sélénium.

Quant aux séries ‘Remplacement des viandes et poissons’, leur ANM est comprise entre celles des séries ‘Retrait du plat protidique’ et ‘Aucun respect’. Leur médiocre performance nutritionnelle s’explique à la fois par la perte des nutriments indispensables apportés par la viande et le poisson et par le fait que les plats actuellement servis dans les écoles en remplacement de la viande ou du poisson sont peu diversifiés, consistant essentiellement en des plats à base d’œufs et/ou de fromage et de céréales, et de faible qualité nutritionnelle.

Cette étude démontre pour la première fois, l’intérêt nutritionnel des critères fréquentiels de service des plats définis par les directives françaises sur la restauration scolaire. Elle souligne également l’importance des spécificités nutritionnelles des plats protidiques et montre que des scénarios d’éloignement important des critères portant sur ces plats sont susceptibles de dégrader la qualité nutritionnelle des repas. Ainsi, en absence de définition précise des caractéristiques nutritionnelles des plats protidiques sans viande ni poisson, la généralisation de leur service dans les écoles détériorerait globalement la qualité nutritionnelle de la restauration scolaire.