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La cantine, à bout de souffle ?

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La restauration collective française est confrontée à des défis sans précédent, menaçant son équilibre économique et structurel. Entre les exigences croissantes de qualité et de durabilité avec entre autres les lois EGAlim et Climat & Résilience et la flambée des coûts et, le modèle actuel montre ses limites. Pour relever ces défis, les acteurs du secteur, comme le souligne François Mauvais, président de Cantines Responsables, appellent à une évaluation rigoureuse des performances des services de restauration et à une optimisation des ressources.
La restauration collective française traverse une crise économique et structurelle, comme le souligne l'article des Echos « La cantine, un modèle économique à bout de souffle » *.
Cela semble évident à de nombreux professionnels de la restauration collective que face à des contraintes législatives croissantes, des coûts en forte hausse dans un contexte inflationniste, il est crucial de repenser le modèle économique de ce secteur clé.
Pour cette raison et avant toutes choses, « nous devons travailler à définir et mesurer les performances des services, identifier les marges de manœuvre et garantir une gestion optimisée, quels que soient les modes d'organisation, publiques ou privées » annonce le président de Cantines Responsables, François Mauvais.
Une pression financière et législative écrasante
Comme chacun sait dans le secteur, depuis plusieurs années, la restauration collective fait face à des exigences toujours plus élevées : transition écologique, mise en œuvre des lois EGAlim, Climat & Résilience, , sans oublier les impératifs de qualité et sécurité alimentaire, et enfin sans négliger l’arrêt des contenant en plastique.
Ces contraintes engendrent des surcoûts significatifs, évalués entre 20 et 30 % par certains. Cette pression se cumule avec une inflation des denrées (+16 % en quatre ans) et des salaires (+18 %) (sources de ces données ?), menaçant directement la viabilité des opérateurs publics et privés.
Une performance globale mal mesurée
Malgré ces défis, « peu d'efforts ont été faits pour évaluer la performance globale des services de restauration » comme le souligne le président de Cantines Responsables. « Trop souvent, les analyses se concentrent sur quelques critères qualitatifs sans intégrer les coûts réels et leur répartition ». Or, comme le rappelle François Mauvais, « il est indispensable de réaliser un diagnostic multidisciplinaire des performances pour établir des trajectoires de progrès ».
Ce diagnostic devrait inclure :
- L'analyse des coûts complets : tant en gestion directe qu’en gestion déléguée, coûts directs (denrées, frais de personnel, énergie…), frais indirects liés au recours à des prestataires et à des intermédiaires, et amortissements des investissements.
- La construction d'indicateurs de performance extra financiers : conformité aux lois, satisfaction des usagers, externalités positives (emploi local, transition écologique…) et externalités négatives (manque de suivi, absence de transparence vis-à-vis des usagers …).
- La transparence sur les résultats : rares sont les services, notamment en gestion directe, qui produisent des bilans annuels détaillés accessibles aux citoyens pour évaluer la qualité, l’efficacité et l’efficience du service.
- Donner aux autorités organisatrices les outils d'amélioration
« Un cadre d'évaluation robuste permettrait aux collectivités locales et aux opérateurs de prioriser les actions, qu'il s'agisse d'investissements matériels, d'optimisation des ressources humaines, voire d'ajustements tarifaires » insiste le président. Cela leur fournirait également les moyens de répondre aux attentes sociétales : des repas de qualité, une empreinte écologique réduite, et un soutien à l'économie locale.
La restauration collective, un levier stratégique
Au-delà de son rôle en matière d’alimentation, la restauration collective est un pilier de la cohésion sociale et de la lutte contre la précarité. Elle contribue également à des enjeux de santé publique, d'inclusion sociale et de transition écologique. Pourtant, comme le souligne le Syndicat national de la restauration collective (Les Echos), ces dimensions ne peuvent être assurées sans une prise en compte réaliste des coûts et une mobilisation accrue des décideurs politiques.
Appel à une mobilisation collective
Pour assurer la pérennité de ce modèle, il est urgent de :
- Rendre obligatoires des diagnostics réguliers et transparents de performance pour toutes les autorités organisatrices d’un service de restauration.
- Optimiser les budgets publics alloués, en tenant compte des priorités de l'autorité organisatrice, de l'inflation et des objectifs écologiques.
- Encourager les initiatives locales et les partenariats avec les producteurs français, en intégrant ces efforts dans des plans stratégiques clairs.
En somme, assurer un service de restauration scolaire performant sur 150 jours de classe par an nécessite une gouvernance éclairée et une approche systématique de la mesure des performances. Car sans une évaluation des pratiques actuelles, les coûts, tant financiers qu'écologiques et sociaux, risquent de devenir insoutenables pour tous et mettre en péril ce service indispensable.
Laurent Terrasson
*Les Echos du 21 janvier 2025, article de Martine Robert
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